Gioacchino BARBERA |
On ne lit pas cet ouvrage, on le contemple. En plein Quattrocento, entre Naples et Venise, Antonello de Messine est bien un maître de l'art. Aux alentours de 1457, l'atelier du peintre est le premier et le seul à s'imposer en Sicile, en particulier à Naples où les règnes successifs de René d'Anjou et d'Alphonse V d'Aragon se révèlent d'étourdissants manifestes esthétiques. Auprès de son maître Colantonio, qui jouit de grandes faveurs dans les milieux culturels les plus avancés, Antonello se forme et fait son miel de tout ce que cette ville contient alors de vitalité artistique. A la manière picturale de la Renaissance italienne, à la technique flamande dite « ponentine » de la peinture à l'huile, il joint les expressions plastiques bourguignonnes et provençales, sans compter la culture et le répertoire humanistes. C'est à juste titre que l'auteur insiste alors sur les commandes vénitiennes de portraits que la remarquable présentation pleine page permet de contempler à loisir. Ce chapitre est le joyau spirituel de l'ouvrage, car ces portraits sont précisément le lieu où, « par une magie dont Antonello est l'unique dépositaire », s'exprime l'alchimie des éléments flamands et de la lumière italienne. Chaque page s'ouvre sur un portrait trois quart dont l'intensité fait subitement communier le lecteur au regard que le peintre a posé sur le monde. Chantal Leroy |