André PICHOT |
André Pichot est un excellent historien, qui nous a déjà donné L'Histoire de la notion de vie, puis L'Histoire de la notion de gène. Ces deux ouvrages préparaient celui que nous recensons. De Darwin à Hitler : comment la théorie de l'évolution a-t-elle pu servir de base au racisme ? La seconde moitié du xixe siècle voit l'avènement de l'ère industrielle, qui entraîne l'enrichissement des uns et la constitution d'un prolétariat pauvre, mal logé, mal nourri, avec pour conséquences la maladie, l'alcoolisme, etc. La théorie de l'évolution par le moyen de la sélection naturelle donne une base scientifique au triomphe des plus « aptes » et leur confère une supériorité biologico-sociale sur les plus pauvres. Dans la première moitié du siècle, la génétique se développe ; elle rend compte de l'hérédité des caractères physiques et, par extrapolation abusive, des caractères psycho-sociaux. On postule alors que le métissage (entre classe supérieure et classe inférieure) est la cause de la dégénérescence de la société. Haeckel, entre autres, établit un arbre généalogique des espèces. Leur degré d'évolution crée une hiérarchie, y compris dans l'espèce humaine, la société la plus évoluée étant celle de la race blanche, surtout dans les pays nordiques où elle est la plus pure. Pour préserver sa supériorité, il faut empêcher sa contamination par les autres groupes porteurs de tares physiques ou psychiques. D'où les lois sur la stérilisation des « indésirables », dès 1907 aux Etats-Unis, puis en Europe jusqu'à la guerre de 1940. C'est ainsi que le darwinisme a donné une base « scientifique » au racisme. Histoire très complexe, qu'on ne peut résumer sans la trahir, mais que le livre de Pichot analyse avec finesse. Il détruit bien des idées fausses, des « romans » inventés de toute pièce pour justifier des idées a priori. Un livre très riche, qui repose sur une abondante documentation. Jean-Marie Moretti |
Juin 2000 : Revue des Livres - Choix de Disque - Sommaire du numéro
Accueil