HAENDEL
Alcina
Alcina : Renée Fleming ; Ruggiero : Susan Graham ; Morgana : Natalie Dessay ; Bradamante : Kathleeen Kuhlmann ; Oberto : Juanita Lascarro ; Oronte : Timothy Robinson ; Melisso : Laurent Naouri. Les Arts Florissants, dir. William Christie. Erato 8573-80233. 3CD.

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Alcina se présente comme un « opéra de chambre » d'une radieuse beauté, qui s'est imposé comme un chef-d'œuvre dès sa création, suivie de dix-huit représentations jusqu'en 1785. Haendel, en effet, affirme ici sa maîtrise de musicien et de dramaturge dans cet opéra qui se déroule dans une continuité mélodique et scénique, faisant vivre par sa musique chacun des personnages, qui se dessinent dans toute leur vérité psychologique. L'interprétation est le fruit d'un travail soigné du chef William Christie, qui a choisi son plateau pour que chacun, par sa voix et son geste, puisse donner du relief à un opéra qui pourrait être lassant de par ses récitatifs, mais qui prend une allure entraînante, faisant croire à l'authenticité de l'œuvre. Certes, le spectacle a été rodé lors des représentations du Palais Garnier à Paris, mais il est ici dépouillé de tout le fatras des décors et de la mise en scène, prétentieuse et bavarde, de Robert Carsen. La seule musique prend alors toute sa force intérieure. Alcina est cette sorcière qui attire les beaux chevaliers sur son île enchantée pour se les approprier à jamais, les transformant en pierres, arbres ou animaux (c'est déjà du grand Racine...) et qui, par peur de la vieillesse, se perdra par amour. Renée Fleming campe cette héroïne bouleversante, avec sa voix généreuse, de tradition belcantiste, mais qui s'est bien adaptée au style de la musique baroque ; elle sait faire vivre ses interminables récitatifs ou monologues, qui dessinent des personnages extraordinairement vivants. Autour d'elle, dans le rôle travesti de Ruggiero, l'excellente mezzo Susan Graham ; et l'on retrouve le dynamisme et l'humour instinctif de Natalie Dessay dans le rôle de Morgana ; citons aussi Juanita Lascarro, Laurent Naouri et le ténor Timothy Robinson : un merveilleux plateau, entourant notre belle sorcière. Mais c'est finalement William Christie qui sort grand vainqueur avec ses « Arts Florissants », déployant dans leur splendeur orchestrale toutes les couleurs et les contrastes d'une musique de rêve.

Claude Ollivier

Avril 2000 : Revue des Livres - Choix de Disques
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